Le château de La Cassagne et la grange dîmière du XIIIe siècle - Périgord noir
- Glady de Brégeot
- 17 mars 2023
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 22 mai
En 1251, la vicomté des Turenne dont fait partie La Cassagne est partagée entre le vicomte de Turenne et Alix de Turenne qui a épousé Hélie Rudel. En 1281, Aymeric et Hugues de La Cassagne sont co-seigneurs de Salignac, avec les Salignac, Vals et Belcastel. Le château-fort de La Cassagne est le siège d’une seigneurie qui relève de la vicomté de Turenne et un hameau va se développer dans le voisinage immédiat de la motte féodale, avec quelques métairies, placées sous l’autorité du seigneur. C’est à cette période que l’église romane a été construite, dépendante du prieuré de Saint-Amand de Coly.
En 1364, au moment d’une accalmie dans la guerre de Cent Ans (Paix de Brétigny), Gilbert de Domme, sénéchal du Périgord et père de Catherine de Domme, vend le « locum seu castrum de la Cassanha », à Bertrand d’Aitz, son gendre qui rend hommage au comte de Périgord et y installe sa descendance jusqu’au milieu du XVIe siècle.
Hugues d’Aitz de La Cassagne, seigneur du lieu et de Vielval, dont les parents sont Hugues Philippe d’Aitz et Marguerite de Noailles, épouse, le 24 avril 1498, Marguerite de Hautefort, fille d’Arnaud de Hautefort et de Catherine de Royère.
Le couple a trois enfants. Ce beau mariage lui permet de réaliser d’importants travaux sur le château du XIIIe dont il ne subsiste dans la cave voûtée en plein-cintre, que la partie inférieure d’un escalier à vis portant noyaux et contremarches délardées. Un souterrain, creusé dans la roche, qui suit deux directions différentes, semble être accessible depuis cette cave.
En 1541 Jean d’Aitz, seigneur de La Cassagne et de Beaupuy à Auriac est baron de Tournay-Charente en Saintonge. Le château semble avoir été détruit pendant les années de guerre.
Le 1er Juillet 1593, François de la Cassagne qui porte les mêmes titres que son père Jean, rend hommage de la seigneurie de La Cassagne au roi de Navarre comte de Périgord, qui échange la terre de La Cassagne avec le seigneur de Bourzolles, François II de Coustin de Bourzolles . » Le Grand Bourzolles », seigneur de Bourzolles, vicomte de Carlux, baron de Berbiguières devient alors seigneur de La Cassagne,
Quand il meurt en 1615 à La Cassagne, il laisse ses biens à son fils, fanatique protestant, François III de Bourzolles de Caumont (sa mère était Françoise de Caumont-Castelnaud) qui se marie, le 6 juillet 1615, avec Gabrielle d’Orléans. Il rendra hommage au vicomte de Turenne en 1620. En 1624, il fera aveu et dénombrement de la terre et châtellenie de La Cassagne et testera en 1651.
En 1667, le marquis Jacques François d’Hautefort (décédé en 1689), marquis de Saint-Chamans, Cournil, La Cassagne, rend hommage au comte de Périgord pour la terre et châtellenie (biens nobles, moulins, cens et rentes) de La Cassagne, mouvante du comte de Périgord. Il possède la haute, moyenne et basse justice de La Cassagne.
En 1689, La Cassagne revient à sa sœur Madeleine de Saint-Chamans qui a épousé, en 1658, Léonard de Villelume. Leur petit-fils Louis-Charles (1708-1761) épouse Marie-Thérèse de Bosredon et, sans descendance lègue La Cassagne à son beau-frère Alexandre François de Villelume qui lui aussi n’a pas eu d’enfant.
Le 29 mai 1770, Alexandre François vend la baronnie de La Cassagne à Henry François II de la Rochefoucauld (1716-1785), comte de Cousage.
Au XVIIIe siècle, sur l’assise des vestiges du château du XIIIe et XVIe siècle, est édifiée une nouvelle construction.
Par transmission, Alexandre Armand Louis Henri de La Rochefoucauld (1767-1830), comte de Cousages, capitaine aux hussards des Bercheny avant la Révolution, est seigneur de la « Chasseigne » et autres lieux.
En 1796, vendus comme bien national par le tribunal de Sarlat, le récent château et le domaine divisés en 47 lots sont pratiquement tous attribués aux membres de la famille Boissarie. Le vendeur est « Couzage, émigré ».
Le couple formé par Jean Boissarie (1747-1816), cultivateur et son épouse Jeanne Bregegère, aura dix enfants. C’est leur fils ainé, Jacques-Lucien (1775-1844), qui a épousé en 1797, Marguerite Julienne Marchand, qui héritera du château. Il sera maire de La Cassagne jusqu’en 1832.
Son arrière-petit-fils Pierre René Boissarie (1865-1921) amené à la fonction de maire de Beauregard-de-Terrasson, délaissera le château de la Cassagne.
Le 30 juin 1979, leur fils, Jean Michel Paul Alfred Boissarie, vend la propriété de La Cassagne à un marchand de biens. L’année suivante, le 30 septembre 1980, la grange dîmière, appelée parfois « le temple », est vendue à un architecte parisien qui va la restaurer avec passion et la paysager avec, entre autres, un jardin à la Française. Passionné par SEM (Georges Goursat, 1863-1934), caricaturiste de la Belle Époque, le propriétaire lui a consacré un musée.
Le château lui, sera vendu à un entrepreneur qui y réalisera durant une dizaine d’années de très importants travaux (reconstruction d’une tour, d’une piscine)
En 1990, il est revendu à une famille anglaise qui complètera les travaux du précédent propriétaire, améliorant encore le lieu pour concrétiser un projet de chambres d’hôtes qui ne verra jamais le jour.
En 1996, le château est vendu aux derniers propriétaires, comme un retour aux sources de leur famille établie à La Cassagne depuis le XVIIe siècle.
Description du château actuel :
Château de La Cassagne
Au XVIIIe siècle, sur les vestiges du château du XIIIe et XVIe siècle est édifié une construction de plan en U à laquelle une annexe est adossée au sud entre les deux ailes en retour. L’ensemble de corps de logis, est couvert d’ardoises.
Les façades à étage comportent de grandes fenêtres à plate-bande clavée en arc segmentaire. De fausses fenêtres sur les trumeaux au droit des murs de refends leur donnent une symétrie. Un couloir central commande les pièces du rez-de-chaussée qui ont conservées leur sol de pierre. Un escalier tournant dessert l’étage et les combles.
Depuis la seconde moitié du XXe siècle, le château du XVIIIe siècle, magnifiquement restauré est devenu une propriété privée qui ne se visite pas.
Concernant la grange dîmière :
Aux pieds du mamelon, sur lequel s’élève le château de la Cassagne, se trouvait une grange aux dîmes, destinée à recueillir les redevances étymologiquement de 10% versées en nature ou en espèces sur les produits de l’agriculture locale et à stocker les récoltes. Cette grange comme celles de la plupart des châteaux a pu servir au fil des siècles de temple protestant, de salle de réjouissance populaire, de chai, de bergerie et comme il est certain, d’écurie.
Dans ce bâtiment appelé « le temple » une magnifique écurie est à rapprocher de celle du château de Berbiguières du « Grand Bourzolles » décrite comme « écurie voûtée d’un seul rang pour cinquante chevaux, terrasses, jardins, enclos, réservoir, pièces d’eau etc… ». François II de Coustin de Bourzolles était le propriétaire de La Cassagne en 1615.
La grange dîmière se compose, au rez-de-chaussée, d'une salle basse rectangulaire d’environ 10 x 20 m de trois travées avec des arcs doubleaux et ses croisées d’ogives, une cheminée d’angle servant de forge. Un escalier à vis de large proportion permet d’accéder aux différents niveaux (étage et combles). A l'origine, elle comporte sans doute une aile en retour, au sud-ouest. Une grande porte charretière ouvre au nord, au rez-de-chaussée, sous un porche qui donne accès, à droite, à une sellerie ou réserve à grains ; à gauche, à une tourelle d'escalier. Doubleaux et arcs d'ogives ont été en partie refaits au XVIe siècle. L'étage ne forme plus qu'une seule pièce mais laisse deviner qu'il était divisé en deux à l’origine. Lors du réaménagement, une suite de quatre fenêtres à meneau horizontal est percée à l'ouest.
Éléments protégés : grange dîmière : inscription par arrêté du 14 mai 1980.
Sources – recherches transmises par les propriétaires du château de La Cassagne Elisabeth et Jean-François Blondel et par les propriétaires de la grange dîmière Madame et Olivier Choppin de Janvry.
Photos - Bernard Séris

la grange dîmière du XIIIe siècle

la grange diîmiere

tour du château du XIIIe

le sous-sol du château d’origine (souterrain bouché)

le pigeonnier

le château de 1750 construit sur les vestiges du château moyenâgeux -

le presbytère et l’église
L'église et les bâtiments sont les restes d'un prieuré dépendant de l'abbaye de Saint-Amand de Coly. Ce presbytère ne semble pas remonter plus loin que la fin du XVe siècle. Il se compose d'un corps de logis avec une tourelle d'escalier en avant. Au premier étage se trouve la chambre de l'abbé qui a conservé son lambris 18e, et une grande cheminée. La cuisine date du XVIIe ou XVIlle siècle. le presbytère contigu à l’église est classé par arrêté du 24 août 1936.


portrait de Sem - par François Flameng (1856-1923) « Hippodrome d’Ascot«
(MAAP Périgueux)
Georges Goursat (Né à Périgueux le 22 novembre 1863-1934) alias Sem.
En 1927, il a publié une trentaine d’album et son dernier est influencé par les multiples voyages qu’il fait en Angleterre. Au cours de ses trente années passées sur la scène artistique il croise les noms qui feront basculer le siècle dans la modernité, Cocteau, Rodin, Coco Chanel, Mounet-Sully Sacha Guitry, Pierre Brasseur, Victorien Sardou jusqu’à Colette et Pierre Loti, entre autres. Il meurt à Paris le 26 novembre 1934 salué comme un artiste qui aura marqué une époque révolue, à l’aube du second conflit mondial. Il est inhumé au cimetière nord de Périgueux.

SEM (Georges GOURSAT) (1863 - 1934), Prince of Kapurtala, and Gubelkian in Turkish. Josephine Baker and Gwynne
bonjour la première photo n'est pas la grange dimière, il s'agit du presbytère
Un grand plaisir à chaque lecture ! merci !