Le château de Lanquais surnommé « le Louvre inachevé du Périgord » est en Périgord Pourpre dans le Bergeracois.
Il donne une impression d’unité, malgré la juxtaposition à droite d’un château médiéval greffé a une grosse tour cylindrique défensive des XIV et XV siècles et à gauche d’un palais à l’Italienne de style Renaissance, doublant les bâtiments existants, terminé en 1604, rappelant l’aile Lescot du Louvre.
Le château présente deux bâtiments perpendiculaires formant un T. Sur les toitures, les lucarnes sont couronnées de frontons. Dans l’ensemble l’intérieur est intact, plafond, plancher, menuiseries datent de l’époque de la construction. Les cheminées Italiennes sculptées ont été commandées par Henri de La Tour d’Auvergne. Les charpentes dites médiévales sont tellement impressionnantes qu’elles sont proposées à la visite.
Il y eu au moins trois châteaux à Lanquais. À l’origine sur un site gallo-romain était « Linicassio « puis aux Xe et XIIe siècles, Lanquais fut la résidence de l’évêque de Périgueux. En 1320 il a appartenu à la famille de Mons et en 1457 à la famille de la Cropte. Jean de la Cropte, gouverneur de la place de Beaumont, fait construire une tour octogonale à la place de l’ancien donjon brulé par les Anglais.
Marguerite de la Cropte épouse Gilles de La Tour en 1531 dont la famille est proche des Médicis.
En effet la mère de Catherine de Médicis était née Madeleine de La Tour d’Auvergne.(1)
C’est leur fils Galliot de La Tour de Limeuil qui ordonne en 1561 la construction du nouveau château dans le style Renaissance qui rappelle le palais du Louvre.en faisant appel aux maîtres d.œuvre des résidences royales pour montrer le « pouvoir royal et catholique » dans un pays gagné par les idées de la Réforme. En 1570 Galiot est capitaine d’une compagnie d’ordonnance et chevalier de l’ordre de saint-Michel.
Sa sœur Isabelle de La Tour de Limeuil a à peine 17 ans quand elle part rejoindre à Paris sa cousine éloignée Catherine de Médicis. Isabelle a la beauté et l’esprit pour intégrer « l’escadron volant » de la Régente qui rassemble les plus belles de ses filles d’honneur pour séduire ses ennemis politiques. Elles lui doivent obéissance. Ne pas tomber amoureuse, ne pas être enceinte sont des règles qu’elles doivent respecter impérativement, car Catherine déteste les scandales et la réputation sulfureuse qui est faite à ses filles d’honneur tient aussi du fantasme des historiens.
Elle donne mission à Isabelle de séduire le protestant Louis de Bourbon prince de Condé (frère aîné du roi de Navarre) qui lui est hostile. Bien qu’amoureuse comblée de Florimond Robertet du Fresne, adulée pour sa beauté par Brantôme (qui est à l’origine du terme « escadron volant » et auteur des « Dames Galantes ») comme par Ronsard et autres gentilshommes de la cour, Isabeau comme elle est joliment nommée, devra s’exécuter.
La blonde jeune femme a désormais 27 ans et va ensorceler Condé, puis s’y attacher et tombera enceinte. Le 24 mai 1564 à Dijon, la reine Catherine et son jeune fils Charles ainsi que la Cour et les filles d’honneur sont rassemblés dans la salle d’audience auprès des échevins, quand subitement Isabelle de Limeuil se trouve mal et donne naissance, dans une pièce qui sert de garde robe, à un fils, à l’étonnement général. L’enfant dénommé Nicolas sera envoyé à son père qui ne réparera pas l’outrage en épousant sa mère. Au contraire le 8 novembre 1565 à Vendôme le prince de Condé veuf désormais, âgé de 35 ans va se remarier à la protestante Françoise d’Orléans Longueville.
Isabelle de Limeuil sera reléguée de la Cour pour les Cordelières d’Auxonne . C’est Catherine de Médicis qui va l’en sortir. De retour à Lanquais, Isabelle de Limeuil se marie le 30 janvier 1567 avec le très riche et puissant banquier Scipion Sardini, qui en plus est amoureux et reçoit de la reine à l’origine de ce mariage récompensant sa lointaine cousine, pour ses services, de nombreuses œuvres d’art.
24 mars 1577 Henri de La Tour d’Auvergne (1555-1623) protestant, attaché aux intérêts du roi de Navarre (futur Henri IV) et cousin d’Isabelle et Galliot de La Tour de Limeuil, assiègent le château avec cibq canons qui tireront 200 boulets. Ce siège entraîne de nombreux dommages au château et marque l’arrêt des travaux.
1588 malgré l’opposition farouche de sa cousine Isabelle Sardini, Henri de La Tour d’Auvergne légataire de Galliot, héritera du château.
1591 Henri de la Tour d’Auvergne devient duc de Bouillon et prince de Sedan à la suite de son mariage avec Charlotte de La Marck. il avait contribué en 1587 à la victoire de Coutras par les troupes d’Henri IV. le roi l’a nommé Amiral puis Maréchal de France.
1595 Henri de la Tour épouse en secondes noces Élisabeth de Nassau, fille de Guillaume de Nassau, prince d’Irange (et gendre de l’amiral de Coligny). De ce mariage naîtront Fredéric-Maurice, duc de Bouillon et le futur Maréchal de Turenne (1611-1675).
Le manoir sera prolongé et une aile soudée en équerre, mais restera inachevée.
La partie ancienne trouée d’impacts de tirs va contrastée avec la nouvelle partie achevée en 1604. Les quatre niveaux sont soulignés par des bandeaux et des refends d’angles des murs et des baies. les baies du dernier niveau sont plein cintre. Les lucarnes seront un exemple de l’art de la Renaissance ainsi que son portail plein cintre encadré de pilastres. L’intérieur ne souffrira pas et ses plafonds, planchers et menuiseries Renaissance ainsi que les fameuses cheminées italiennes l’une à piédroits galbés et l’autre à piédroits verticaux en feront l’objet dés lors de l’admiration patrimoniale. En 1602 Henri de La Tour d´Auvergne participe au complot monté par Charles de Gontaut duc de Biron avec le duc de Savoie, contre le Roi Henri IV. Après la découverte du complot, Henri IV lui pardonne à l’inverse du duc de Biron qui refuse d’avouer donc de se repentir bloquant le pardon royal et qui sera décapité. Une expression populaire a circulé depuis cette époque « Être con comme Biron » https://perigordalentour.wixsite.com/website/post/biron-au-carrefour-du-périgord-du-quercy-et-de-l-agenais..
En 1623 Le château revient à son fils Frédéric-Maurice, duc de Bouillon, qui le délaisse et le revendra au duc d’Antin Vers 1720.
Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne, duc de Bouillon et la duchesse Eléonore de Bergh auront dix enfants dont un fils Théodose de La Tour (1643-1715), qui deviendra Cardinal grand aumônier de France et doyen du Sacré Collège.
En 1732, Marie de Mons, veuve de Michel de Gourgues, achète le château de Lanquais au duc d'Antin. Ce qui fait dire à l’actuelle propriétaire Odile Bertaux de Brandois que son château est entré dans sa famille par les Gourgues en 1732.
En 1949 à la mort de l’Abbé de Gourgues, le château est revenu à sa sœur Marguerite Foucher de Brandois, mère d’Odile.
La propriétaire Madame Odile Bertaux de Brandois met tout en œuvre pour sauvegarder le patrimoine avec l’aide précieuse de l’Association « Au fil du temps » qui reprend la gestion de l’animation.
Le Château de Lanquais accueille chaque année des manifestations diverses (fête médiévale, brocante, animation). Il propose aussi des locations de salles, gîtes, organisations de mariages et fêtes privées et bien sûr la visite de ce lieu d’exception classé aux Monuments historiques le 8 juillet 1942 et inscrit le 14 septembre 2010.
Les trois dernières photos son empruntées à une vidéo »des racines et des ailes ».
(1) Laurent II de Médicis, duc d’Urbino, neveu du Pape Léon X sera le parrain du premier fils de François 1er. Le bel Italien épousa la jeune comtesse Madeleine de La Tour d’Auvergne et c’est François 1er qui les uniera avec un faste digne d’un mariage royal. Cette union permettait par le jeu diplomatique, le rapprochement entre la papauté et le royaume de France. Le couple eut un petite fille nommée Caterina mais après l’accouchement Madeleine mourut d’une fièvre puerpérale. Comble de malchance, six jours plus tard, terrassé par la syphilis contractée avant mariage, le père suivit le triste sort de la mère. L’enfant fut recueillie par une grand–mère, puis par une tante qui lui donnèrent une éducation des plus raffinée. Mais personne n’aurait pu imaginer que cette enfant serait reine de France et serait la mère de trois souverains français, d’une reine de France et d’une reine d’Espagne. Elle se prénommait donc Caterina Maria Romola et sera connue sous le nom de Catherine de Médicis.
Ces informations me sont communiquées gracieusement par JL Béjihel Brück - car je m’interrogeais sur ce cousinage -
Au pied du château de Lanquais se dresse la grange de Lanquais (grange aux dîmes oû était prélever d’impôt). Construite au XVe siècle elle possède une toiture pendue et une charpente à trois nefs dont les piliers, constitués d’un énorme chêne ont résisté au temps. Cette grange a pu servir au fil des siècles d’hôpital, de temple protestant, de salle de réjouissances populaires, de chai, de bergerie. Aujourd’hui elle est propriété de la commune. Des manifestations culturelles des mariages… y sont organisés.
Inscrite à l’inventaire des monuments historiques depuis le 17 juin 1942.
deux cheminées monumentales Renaissance - celle-ci à piédroits galbés flanque les portes.
Un "palais à l'italienne" ? Sans doute voulez-vous parler du pavillon couvert d'un haut comble typique de la tradition française, pavillon qui imite celui du Louvre : modèle français donc, élevé par un architecte français.