Au départ de Carsac via La Roque-Gageac pour terminer à Beynac, après avoir été éblouie par le château de Montfort en empruntant le cingle (méandre), voir Domme est plutôt une interrogation, car vues de la rivière à plus de 150 m, ce sont les terrasses qui apparaissent et rien ne suggère un village fortifié.
Un retour sur la raison de l’implantation des bastides, s’impose. Aliénor d’Aquitaine épouse en 1152 le futur roi d’Angleterre Henri Plantagenêt et le Périgord tombe dans le giron anglo-saxon….
Entre 1222 et 1373 le Sud-Ouest de la France va voir la fondation de près de quatre cents bastides.
25 bastides vont être édifiées en Périgord en 50 ans entre la guerre des Albigeois et la guerre de cent ans. A partir de 1272 ce sont les Sénéchaux qui agiront pour le compte des rois de France ou sur ordre du roi d’Angleterre.
En 1281 , alors que Français et Anglais se disputent l’Aquitaine et édifient des villages fortifiés pour asseoir leur pouvoir politique et économique, le roi Philippe III le Hardi perçoit l’intérêt stratégique de ce qui n’est alors que le "plateau de Domme" et y fait édifier la bastide sur un plan régulier de rues se coupant à angle droit. En 1307, lors du procès des Templiers, l’imposante porte des Tours avec ses deux tours encadrant l’entrée ont servi de chambres de garde mais aussi de prison à 70 d’entre eux, détenus de 1307 à 1318.. Devenus trop puissants et gênants, les templiers furent jugés hérétiques. Rappelez-vous : au matin du vendredi 13 octobre 1307 tous les templiers de France, soit plusieurs milliers au total sont arrêtés sur ordre du roi Philippe IV Le Bel, petit-fils de Saint-Louis. Si il garde une certaine amertume du refus de l'ordre de payer la rançon pour libérer Saint Louis, prisonnier, il doit surtout reprendre la maîtrise des finances de son royaume. Pas plus qu’il n’a hésité le 21 juin 1306 à expulser les Juifs de France pour faire main basse sur les biens des usuriers juifs afin de renflouer le trésor royal, il n’hésitera pas à abattre l’ordre du Temple.
Munie d'importants privilèges (Domme a par exemple sa propre monnaie), la bastide est en outre le siège de la Sénéchaussée du Périgord Quercy dés le 14ème siècle. il est d’usage de qualifier les bastides de « villes nouvelles » marquant la rupture avec la cité médiévale organisée autour d’un château, d’une abbaye ou d’une église, dans un contexte de rivalité entre le roi de France et celui d’Angleterre (qui est aussi duc d’Aquitaine).
Les fondateurs garantissent le droit d’asile, l’exemption du service militaire, le droit à l’héritage… pour le prix d’une parcelle de terrain à bâtir ou à cultiver. La volonté d’un ou plusieurs seigneurs est de rassembler stratégiquement des populations pour exploiter la terre. Les habitants peuvent devenir commerçants ou artisans et marier leurs filles comme ils l’entendent . La bastide est gérée par le bayle (bailli) qui représente le roi, rend la justice et perçoit les impôts tandis que les consuls choisis par les habitants assurent l’administration.
Les Anglais la convoitent et la prennent en 1347. À plusieurs reprises elle change de mains jusqu’en 1437, date de son retour dans le domaine français. Domme résiste aux huguenots mais de 1588 à 1592 la Bastide tombe aux mains du capitaine protestant de la garnison de Castelnaud, Geoffroi de Vivans. Enfin, elle dut faire face à des jacqueries de croquants en 1594 et 1637 et ces jacqueries font partie de son histoire. (1)
La visite de Domme se fait à pieds et la cité médiévale, fort bien conservée permet aux visiteurs de découvrir ses remparts construits en 1300 qui ferment le bourg et qui, comme les rues s’adaptent à la forme en trapèze de la bastide avec ses trois portes fortifiées : Porte de la Combe, Porte del Bos, Porte des Tours. Il ne faudra pas rater la maison du batteur de monnaie, la maison des consuls, celle de l’Evêque, la vieille halle et l’hôtel du Gouverneur. A voir également les deux places, la place de la Halle où se faisait le commerce et celle de la Rodes où se pratiquait le supplice de la roue. On ne saurait oublier parmi les curiosités, la Grotte de Domme et l’Oustal du Périgord - le Musee d’Arts et Traditions Populaires. Le petit train permet une lente et complète visite de La bastide. Domme fait partie de l’association « Le plus beaux villages de France ».
(1)Eugène Le Roy, a écrit « Jacquou le Croquant« en 1899. L’écrivain est né à Hautefort, de parents modestes, employés du Baron de Damas propriétaire du Château de Hautefort –
Percepteur à Montignac où il est mort en 1907, il a certainement connu la perception de Domme puisque son nom y est apposé, dans la rue qui porte son nom.
l’esplanade du Belvédère surplombant les lacets de la Dordogne -
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