En ce début du mois de mars 2022, Gérard de Colombières a bien voulu nous consacrer un long moment et ma vision historique en est bouleversée.
En effet, le temps a fait son œuvre et désormais Château L’Evêque porteur de son histoire, se tourne vers l’avenir en consacrant une partie de son château à l’évènementiel. L’ancienne salle de Gardes qui mesurait 500 m2 avant l’incendie de 1905 est désormais prête et plusieurs manifestations sont programmées.
En effet, le passé militaire du lieu, semble s’estomper et le monument lui-même offre la vision bucolique que Jenny Sacerdote avait largement créée avant guerre.
Aujourd’hui, le site est entouré d’un parc de 17 hectares. Il offre aux visiteurs une halte reposante et romantique avec son parc à l’anglaise, son jardin à l’Italienne, son allée cavalière de 300m de long, son bois et son cours d’eau (source) appelé ruisseau de Mesplier.
Racheté en 2016, son propriétaire s’emploie à le restaurer et remet en état son parc qui est devenu, à compter de 2017, un sanctuaire d’hydrangeas ( Pépinière de la Thyle à Bruxelles). Des rosiers Anglais de chez David Austin y sont peu à peu plantés. Les roses anciennes d’André Ève et des rosiers Pierre de Ronsard de chez Meilland, vont compléter désormais la résurrection de la roseraie. Des arbres plusieurs fois centenaires précisent l’Histoire du domaine. Il est possible de loger au château et le propriétaire se charge volontiers de la visite guidée tant il aime à en raconter l’histoire aux milles péripéties et aux anecdotes émouvantes.
Jusqu’en septembre, le château accueille ses hôtes tous les jours.
Le mercredi est jour de fermeture.
L’histoire de Château l’Evêque -
Par décret du Roi Louis Philippe en 1831, la commune de Preyssac d’Agonac à 7 km de Périgueux a pris le nom de son château épiscopal « Château l'Evêque ».
Forteresse dès le XIe siècle, le château épiscopal fut construit par Adhémar de Neuville Évêque de Périgueux de 1347 à 1349 puis remanié aux XVe et XVIe siècles. C’est à la fois une forteresse chargée de surveiller la route de Périgueux à Brantôme et Angoulême et la résidence d’été des Evêques de Périgueux.
Intimement liée, l’église St Julien de Château l’Évêque servit de chapelle de secours à la population qui se groupa autour de la demeure épiscopale durant les guerres qui précédèrent la Paix de Brétigny. Le 24 octobre 1360, les rois Jean II et Édouard III accompagnés de leurs fils aînés, ratifient cet accord à Calais, ce qui permet une trêve de 9 ans dans la guerre de cent ans. En 1364, l’Eglise Saint-Julien ainsi que celle de Preyssac étaient déjà presque totalement détruites. L’église Saint-Julien sera remise en état par l’Évêque Pierre Tison qui y fut inhumé par la suite.
Le 5 mars 1372, quatre capitaines et une armée partent de Périgueux pour défendre Château l’Évêque contre l’invasion Anglaise. Ses tours crénelées ont essuyé bien des orages, guerres anglaises, troubles et luttes religieuses…
Vers 1515 l’Evêque Guy de Castelnau fait reconstruire dans le goût de l’époque un nouveau logis et fait ouvrir des baies à meneaux.
Nota – revenons sur la richesse et le prestige des Évêques au XVIe siècle - Les quatre baronnies du Périgord tenues par quatre puissants barons égaux en orgueil, étaient Beynac, Mareuil, Biron et Bourdeilles. Pourquoi quatre ? … parcequ’il faut être quatre pour porter le trône de tout nouvel évêque faisant son entrée à Périgueux et cela donnait lieu à chaque fois à de terribles luttes d’étiquette. Les plus enragés étaient les sieurs de Bourdeille et Biron qui par exemple, à l’entrée du révérend Père en dieu Foucauld de Bonneval, le ler janvier1532 arrivèrent escortés chacun de quelque trois ou quatre mille hommes armés jusqu’aux dents, pour être en tête.
- les guerres de religion (1562-1598) - série de huit guerres civiles qui ont frappé la France -
Dans la seconde moitié du XVIe siècle, les Huguenots attaquent le château à plusieurs reprises. L’Évêque Pierre Fournier issu d’une noble famille auvergnate, est chanoine de la Sainte-Chapelle de Paris lorsqu’il est nommé Évêque de Périgueux (de 1561 à 1575). Pendant son épiscopat la réforme protestante se développe dans son diocèse. Il est dépassé car il est faible et manque d’autorité. Capturé il n’est libéré que contre le paiement d’une forte rançon...
Il sera assassiné au château dans la nuit du 14 juillet 1575 par ses « serviteurs Auvergnats soudoyés par les hérétiques« . Étranglé et recouché sur son lit. Son trésor est pillé. Le roi Henri III désigne dès le 18 juillet, François de Bourdeille-Montancey pour lui succéder. Celui-ci obtiendra du roi, le privilège exhorbitant du titre d’Evêque de Périgueux (de 1576 à 1600) par « permission divine » avec la majeure partie des revenus de l’évêché. François de Bourdeille-Montancey né en 1516 est le fils du seigneur de Bernardières, il était Moine à l’abbaye de Saint-Denis.
Les huguenots qui occupaient Perigueux, rendirent son épiscopat bien difficile. on peut considérer que par sa sagesse et ses grandes vertus, il fut un restaurateur de la foi et du culte catholique en Périgord.
En 1581, c’est de Château l’Évêque que part le gros des forces catholiques qui vont reprendre Périgueux aux Calvinistes. Jean de Montardit, seigneur local de la Beylie, est au nombre des capitaines de cette armée.
En 1600, dans l’église Saint-Julien, Monseigneur François de Bourdeille, Évêque de Périgueux, confère l’ordination sacerdotale au jeune prêtre Vincent de Paul (1581-1660) qui sera canonisé en 1737 (Saint-Vincent de Paul). En 1637 des révoltes paysannes grondent à nouveau (la précédente révolte datant de 1595 s’était fort mal terminée pour les croquants. Les croquants ne sont pas des gueux, mais des paysans étranglés par les « tailles royales », rejoints par des gentilshommes des environs de Périgueux faisant cause commune.– Antoine du Puy de la Motte de Château Barrière à Périgueux sera le capitaine des croquants. Les insurgés prennent la ville de Bergerac où le 10 mai 1637 Antoine du Puy est auto-proclamé Maire. 15 000 insurgés marchent sur Grignols qu’ils investissent. 10 000 hommes délivrent les leurs, à Excideuil et saccagent Château-L‘evêque.
Lorsque la révolution de 1789 éclate, la commune de Preyssac d’Agonac y adhére une des premières, comme tout le Périgord. Pierre Pascal Charles Peyssard, né dans la commune, fût un des 371 conventionnels qui votèrent la mort de Louis XVI sans aucune réserve.
Le domaine est vendu comme bien national et des éléments défensifs sont détruits. Le fossé qui isolait le château et un donjon, ainsi que des murs seront supprimés. Cependant l’ensemble constitué par plusieurs logis flanqués d’un pavillon et de plusieurs tours, reste avec ses parties couronnées de mâchicoulis et de créneaux, l’un des édifices harmonieux et impressionnants de l’art gothique en Périgord. Les anciens communs ou éléments défensifs supprimés ont été remplacés par des jardins. En 1873 le vicomte de Gourgues indique que le parc s’étend sur 43 hectares…
De la féminité jamais entrevue, va arriver. En effet une dame élégante qui rêvait de ce château, va se l’offrir. Jenny Sacerdote (née Jeanne Bernard en 1868 à Périgueux et décédée à Nice en 1962) était une célèbre couturière parisienne de l’entre deux guerres dont la marque rayonna jusqu’aux Etats-Unis. Coco Chanel fut sa rivale et finit par la supplanter. Elle fut la 2ème femme en France à recevoir la légion d’honneur pour ses services rendus à la couture. En 1923 Jenny Sacerdote retourne dans le Périgord pour y acheter Château l’Évêque. Elle entreprend de le remettre en état, aménage le jardin. On dira qu’elle a la plus belle roseraie de France, qui fut malheureusement détruite en 1940.
En 1938 le château est inscrit aux monuments de France.
Dans la seconde moitié du XXesiècle, pendant quelques années, le château a été transformé en hôtel-restaurant nommé le château Saint-Vincent. . De 1988 à 1992 il est le siège social d.un marchand de biens la « Compagnie Périgourdine »,
Aujourd’hui, c’est un lieu de paix qui vous accueillera.
Curieusement selon les points de vues, le château se transforme et passe de la forteresse au château d’agrément -
mars 2022 - la gloriette préfigurant la future « roseraie dans l’esprit de Jenny »
La Roseraie voulue par Jenny Sacerdote
l’Église Saint-Julien du XIVe siècle servait de chapelle castrale. Elle fut agrandie en église paroissiale dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Elle fit l’objet d‘une donation par les châtelains aux villageois lors de la création de la commune en 1831.
« le saut du Loup »
Madame Jenny par JG Domergue 1923 - Musée d’Art et d’Archéologie de Périgueux
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