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  • Photo du rédacteurGlady de Brégeot

le château de l’Herm à Rouffignac - Périgord Noir

Dernière mise à jour : il y a 4 jours

En  1499, le site appartient à deux puissants co-seigneurs féodaux Charles de Caumont seigneur de Berbiguières et François de Lacropte seigneur de Lanquais qui le cèdent vers 1500 à Alain d’Albret qui lui-même a rétrocédé par avance ses droits à Jean II de Calvimont avocat et conseiller au parlement de Bordeaux., ambassadeur d’Albret ou de France.  En 1511 lorsque Jean II teste, les Calvimont peuvent se dire seigneurs de Tursac, de Lerm, de la maison noble de Calvimont à Plazac, et aussi de la maison-forte de Reignac.  Jean III (1490-1557)  épouse Marguerite de Talleyrand en 1522 dont le père est le seigneur de Saint-Paul de Serre et  il achète en 1526 la charge de second président de la cour du parlement de Bordeaux et est envoyé en Espagne par François 1er comme ambassadeur auprès de Charles Quint (le roi venait de rentrer de captivité à Madrid après la défaite de Pavie et avait été libéré en échange de ses enfants gardés en otage, qui finiront par être libérés trois ans plus tard). Rentré à Bordeaux il est juge d'une chambre spéciale contre les réformés. Ses prises de position contre les protestants lui valent une interdiction d'exercer et séjourner à Bordeaux de 1544 à 1547. Pendant cette période, il semble se retirer à l'Herm et y faire des aménagements et à la mort de François 1er, il reprend ses activités de magistrat. Son épouse meurt sans descendance et il va se marier en seconde noce en 1555 avec Marguerite de Farges dame de la Chapelle Faucher avec qui il aura trois enfants : Louise, Marguerite, et enfin Jean IV (1557-1586) né après le décès de son père au château de Saint-Paul de Serres en janvier 1557.

 

L’Herm possède un grand corps de logis rectangulaire de 25 m de long sur 10 m de large, aligné sous des créneaux à triple corbeaux avec un triple rang de fenêtres à meneaux de pierre.  Des tours puissantes se font face aux angles du sud-ouest et du nord-ouest ; sur  la façade opposée celle de l’Est , pas exactement au milieu,  une troisième tour d’escalier de forme polygonale, porte ses créneaux avec un étage plus haut que ceux du corps de logis. Les contreforts qui renforcent ses angles sont décorés de pinacles à contre-courbes et se terminent très haut, en choux frisés. Dans cette tour, face au pont, s’ouvre la porte d’entrée de style gothique flamboyant, encadrée de moulures à pénétration qui se croisent à leur sommet au-dessus d’un tympan (disparu), l’archivolte en courbe et contre-courbes épaulée par d’élégantes colonnettes, est décorée de crochets et de pinacles. A droite et à gauche en demi-relief deux statuettes de chevaliers ont été martelées. La porte franchie, livre un escalier monumental en spirale aux larges et profondes marches qui dessert seul le château tout entier.  Sa tige moulurée s’épanouit en haut sous la voûte de la tour, comme les branches d’un palmier et la décompose en ogives. Les clés de voûte portent les armoiries des Calvimont et un écusson où s’entrelacent les lettres « J.H.S ». 

En  1581 Jean IV est un des capitaines de la troupe de Catholiques qui prennent Périgueux qui était alors tenu par les Protestants. L’année suivante, il épouse Anne d’Abzac de la Douze, d’une ancienne et puissante famille, également du parti catholique. Ils ont deux filles, Jeanne (qui le suivra de près dans la tombe) et Marguerite son unique héritière.

1583 : il rend hommage au roi de Navarre pour Lerm et Tursac avec justice haute, moyenne et basse pour Saint Paul de Serre et le château de Reignac.

C’est Marguerite qui n’a pas trois ans qui hérite de tous les biens de son père qui avait inséré dans son testament une clause de substitution en faveur de son cousin de la branche des Calvimont-Saint-Martial si sa fille venait à mourir sans héritier.

 

La tragédie de l’Herm

Foucault d’Aubusson, seigneur de Beauregard, de La Rue et Sigognac à Lalinde et de Castelnovel en Limousin va épouser Anne d’Abzac en seconde noce pour lui aussi. Sa première femme Françoise de Pompadour lui a donné huit enfants, dont cinq le suivent à l’Herm. Le contrat passé à l’Herm le 14 janvier 1588 règle le mariage des deux veufs et celui de leurs enfants François d’Aubusson âgé de plus de 20 ans et Marguerite 4 ans et demi. Mais Foucault meurt en 1600 lui laissant trois garçons (leur plus jeune fils Hector d’Aubusson seigneur de Castelnovel héritera des biens d’Anne d’Abzac (1555-1632)).

Anne fait valoir ses droits sur la succession de son premier mari Jean IV et de sa fille défunte Jeanne. Marguerite trop confiante laisse son époux qui manque de probité, abandonner à sa belle-mère les terres de Saint-Paul de Serre qui aurait dû lui revenir… il est épris de Marie de Hautefort et en février 1605 fera étrangler sa femme, par ses sbires. Sa belle-mère, Anne de la Douze, dame de Beauregard qui recevra la nouvelle chez son frère Gabriel d’Abzac va accuser son gendre de ce meurtre tout en mesurant assez vite son intérêt car dès le 24 février 1606 elle fixe sa résidence dans son château de Saint-Paul-de-Serre.

Le 28 septembre 1606 François d'Aubusson veuf se remarie avec Marie de Hautefort 23 ans, fille de Louise de Cars et de François marquis de Hautefort, dont ils auront deux enfants, Charles et Françoise. En 1608, Anne d’Abzac de la Douze retire sa plainte contre une partie de l'héritage de sa fille mais les Calvimont de Saint-Martial crient au scandale et l'oblige à revenir contre son gendre. François d'Aubusson se livre alors à la justice, il est incarcéré et meurt en 1618 de mort naturelle.

 Marie de Hautefort fait assassiner les deux frères de Calvimont de Saint-Martial et obtient la propriété du château. Son fils Charles est assassiné en 1636. Pour se protéger, Marie de Hautefort se remarie à cinquante ans passés à Henri Bertrand Raphaël de Beaudet, seigneur du Peuch, dont c'est le troisième mariage, et promet sa fille au fils de celui-ci, Louis de Beaudet sieur de La Roque complice en 1615 de François d’Aubusson. Mais en 1640, Françoise déjà  promise épouse Godefroy de La Roche-Aymon qui aura auparavant tué en duel Louis de Beaudet. Ils auront une fille Jeanne-Armande en 1641et la jeune mère mourra des suites de couches.  En 1643 on imputera encore à Godefroy de la Roche-Aymon  le meurtre de Jean de Calvimont de la Nadalie second époux de l’ancienne bru de Marie, pour lui permettre d’épouser Jean d’Aubusson.

Inspiré, le 19 novembre 1644 Raphaël de Beaudet va décider de régler son compte à Charles sieur de Chaumont « « un batard «  du vieux marquis de Hautefort, lors d’une chasse  dans les bois de Fossemagne…. Beaudet et ses hommes de mains le blesseront ainsi que son fils aîné,  tuant même leur ami La Farge mais c’est le cadavre de Raphaël  qui sera ramené lié sur son cheval.

Marie perdant un nouveau procès, semble vaincue et elle teste le 20 mai 1646, léguant des milliers de livres à ses proches dont son neveu Jean-François de Hautefort qui a entrepris la construction de Hautefort ; tout le reste revenant à son héritière universelle Jeanne-Armande Marie de la Roche-Aymon. Le testament est fait mais la mort n’arrive pas et son neveu, devant les incessantes exigeances de sa tante, finira par accepter un accord de rente, annulant sa créance.

Marie d’Hautefort meurt en 1652 à l’Herm presque septuagénaire, après s’y être maintenue 46 ans.

La seigneurie de l'Herm est mise en vente et beaucoup de familles annexes prétendent détenir un droit sur ces terres. Il y a une adjudication en 1679 et la vente est réalisée en 1682. C'est la nièce de Marie de Hautefort (dénommée elle aussi Marie de Hautefort, duchesse de Schomberg) qui par l’intermédiaire d’un certain Clément a tout acquis pour elle : le château et les terres de Rouffignac, Milhac-d’Aubetoche et Plazac, les terres et les rentes de Fanlac, Thonac, Bars, Fossemagne, Lamonzie-Montastruc, Saint-Georges et Siorac pour la somme de 40 000 livres que la duchesse de Schomberg emprunte à Louvois, pour entrer en possession de la seigneurie où le crime a installé sa tante trois quart de siècle plus tôt. La duchesse de Schomberg surnommée « la Belle Aurore » est la petite-fille du marquis François de Hautefort.  Fille d’honneur de la reine Marie de Médicis, Louis XIII la fera  passer au service de son épouse, Anne d’Autriche dont elle deviendra une amie fidèle et une confidente dévouée.

L’Herm est peu à peu délaissé et abandonné par les Hautefort eux-mêmes qui érigent la ferme principale de la seigneurie en siège de juridiction. Celle-ci fonctionne jusqu'en 1830, date à laquelle les Hautefort vendent le domaine, qui est alors démembré en plusieurs lots. Bâti au XVe siècle, le château de l'Herm a fait l'objet d'une inscription au titre des Monuments historiques le 10 août 1927. Il a subi peu de modifications majeures si ce n'est une protection indispensable sur la tour d'escalier; il était ouvert au public régulièrement depuis 1988 par les propriétaires de l’époque Marie et Dominique Palué qui l’avaient racheté à la famille Plassard.

Épilogue - le château est racheté en 2020 par un esthète séduit par son intégrité architecturale et qui se donne encore quelques années pour restituer l’Herm tel qu’il a été conçu par les Calvimont au début du XVIe siècle afin de lui donner un avenir dans une dimension certainement culturelle.

source principale « la tragique histoire du château de l’Herm » Jean Maubourguet » édité par Clovis Dougnac 1970 -

 

 photos - en provenance du château de l’Herm (juin 2024) -


juin 2024


Le château sera minutieusement démantelé dans le premier quart du XIXe siècle pour en vendre les matériaux :pierre de taille des partie sommitales, bois de charpentes et des planchers, matériaux de couverture, terre cuite au sol… même les ferronneries de menuiseries et les grilles des fenêtres sont descellées pour être vendues. par contre le démantèlement s’est interrompu avant le démontage des splendides cheminées armoriées.

le château ainsi démembré inspirera l’écrivain Eugène Le Roy qui en fait en 1899 le décor de son roman Jacquou le Croquant - cette histoire romancée colle au château de l’Herm et demeure encore aujourd’hui dans les mémoires collectives .

Source - affichage à l’entrée du château.



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