Vers 1264 ,sous le règne de Saint-Louis, « fortalitum de Frausteus » était la possession d’Arnaud de Frastel, seigneur de Mauriac. Par transmission de son fils puis de son neveu il reviendra à Itier de Grignols et en 1432 Fratteau va rester dans la maison des Grimoard pendant 3 siècles.
Vers 1600, François de Grimoard seigneur de Fratteau, épouse Lucrèce de Fayolle de Mellet fille du seigneur de Neuvic. En 1632, leur fils Jean IV Grimoard est nommé Maréchal des camps et armées de Louis XIII. Il aura trois filles qui se partageront les biens. Gabrielle l’une de leurs filles épouse en 1683, Louis-Mathieu de Saint-Chamans. En 1705, leur fille prénommée aussi Lucrèce épousera Jean Bertin, maître de forges en Périgord, apportant le domaine de Fratteau à cette puissante famille de notables de Périgueux.
Des quatorze enfants issus de ce couple deux laisseront une trace dans l’histoire. Louis Mathieu Bertin ne cessera de s’opposer à son père, qui finira par le faire embastiller jusqu’a sa mort, après 27 ans d’enferme. L’autre, plus conforme, Henri Léonard Bertin sera un important ministre de Louis XV et Louis XVI. (Entre autres fonctions, en rapport avec les potiers, Henri Bertin sera nommé commissaire du roi auprès de la manufacture de Sèvres en 1767 et protecteur de la faïencerie de Bergerac. -).
La vie de son père Jean Bertin, a tout d’un roman historique avec l’éclat et l’obscur d‘un noble entrepreneur du XVIIIe siècle -(1)
En 1794, le « vieux château de Fratteau » est vendu comme bien national, démantelé pour en faire une carrière de pierres, la chapelle et d’autres structures disparaîtront. Le reste du château est revendu en fermes indivises (qui ne peuvent être revendues sans l’accord de tous).
Au XIXe, le site est peu à peu abandonné. La présence d’un potier est attesté, ce qui peut paraître, après le protecteur de la faïencerie de Bergerac, un second présage pour le céramiste qui va s'intéresser au site...
XXe siècle, dans les années 1980, Daniel Piron va en être le sauveur. Il est diplômé de
L’École Pratique des hautes études de la céramique Française aux XIVe et XVe siècles. Il quitte la Provence où il exerce et va s’employer à faire revivre l’ancienne industrie potière de la vallée de l’Isle.
Aujourd’hui, l’ancien logis des Bertin a retrouvé ses cheminées des XVe et XVIe siècles, son porche du XVIIe, ses fenêtres à meneaux et un cluzeau creusé dans la falaise par lequel on accède à la réserve d’eau naturelle d’un bassin important, en suivant une montée sinueuse puis à la salle commune du logis. Un cluzeau est un souterrain de défense piégeux avec orifices de tirs, réservé aux gens du château et sans doute, aux habitants qui recherchaient un refuge et celui-ci est unique en Périgord.
Fratteau revient de loin, car il aura fallu la volonté farouche et 35 années à Daniel Piron passionné pour redonner à des ruines sur lesquelles la nature avait repris ses droits, l’apparence d’une maison noble. L’ameublement périgourdin a été pensé en esthète et le château a conservé de belles cheminées des XVe et XVIe sièckes et un porche d’entrée voûté avec quatre niches du XVIIe siècle. Une tour centrale d‘escalier, permet l’accés aux trois étages supérieurs. Au nord l‘édifice est flanqué d’une tour carrée.
Le site de Fratteau est inscrit « site pittoresque de Dordogne » le 11 octobre 1984.
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Parler de Delphine Piron, céramiste diplômée de l’Ecole de Limoges et maîtresse des lieux, est un choix pour terminer sur une note de douceur. En effet, jolie magicienne, elle transforme l’argile et le cuit selon la tradition ancestrale, dans une reproduction de four de la fin du moyen âge, qui atteint plus de 1050 degrés pour la création de majolique et de s’graffiato (qui veut dire dessiner à main levée pour un effet de contraste avec la partie lisse).
Pour la salle médiévale du musée souterrain de poterie de Saint-Emilion (Gironde) Daniel Piron a consacré 18 mois de sa vie de céramiste, pour la réalisation de 50 plaques en reprenant la technique du s’graffiato, exactement comme on le faisait au moyen-âge. Ces plaques racontent l’histoire de St- Émilion et du Sud-Ouest de 1140 à 1450 à partir de documents d’époque. (Un chef d’oeuvre qui ne vous parlera plus d‘art et d’histoire puisque le musée est fermé depuis septembre 2017).
(1) L’homme qui a fait trembler la puissante famille de Hautefort -
En 1738, Bernard de Hautefort, va devoir céder la forge de la Boissière d’Ans à un ancien camarade de régiment Louis Chapon du Bâtiment, qui lui réclame une créance. Ce dernier revendra immédiatement la forge à Jean Bertin maître de forges, qui a pour fils Henri Léonard Jean Baptiste Bertin né en 1720, avocat puis conseiller puis intendant du Roussillon en 1749 puis de Lyon en 1754 et encore lieutenant général de police. En 1763 contrôleur des finances, il essaye de lancer une politique économique en France et se fait remarquer sur deux thèmes : création de l'école vétérinaire (Maisons-Alfort) et il tentera de créer une école des mines. A cette date, il était considéré comme l’un des meilleurs spécialiste de la métallurgie.
Son père Jean Bertin aura fait connaître aux forges, une belle prospérité car en 1691 Louis XIV était en guerre et eut grand besoin de bouches à feu et son principal fournisseur était la forge de la Boissière d’Ans où Maritz et sa machine à forer les canons fut essayée avec succés. Mais la récupération des forges par les filles et petites filles de Bernard d’Hautefort, qui interviendra sous Louis XV, obligera Jean Bertin à abandonner les Forges d’Ans.
Le site avec la poterie et un musée de pièces anciennes sont visitables par groupes de 8 personnes >-



L’incroyable Cluzeau de Fratteau


Delphine et Daniel Piron
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