Dans les années 1860, lors de ses vacances à Saint-Porchaire chez sa sœur Marie, Julien Viaud, adolescent, futur Pierre Loti, s’échappait sur le domaine de La Roche Courbon.
Ce lieu, sur les bords d’un cours d’eau le Bruant enchassé entre deux falaises fut de tout temps choisi par l’homme depuis l’époque Moustérienne (-120 000 ans). À Romette, subsistent l’enceinte d’un village gallo-romain, des tombes mérovingiennes et les restes d’un mur du XIe siècle.
Après trois siècles de conflits avec les Anglais, impossible, vers 1475, pour Jehan II de Latour de ne pas construire un château défensif. Au nord en avant-poste la tour de la Fuye monte la garde et la forteresse construite en forme de triangle sur un éperon rocheux est naturellement défendue par le marais. Elle est composée de deux logis avec quatre puissantes tours et un donjon massif.
Jacques de Courbon épouse Jeanne de Gombaud en 1595 libèrant Romette d’une indivision de cent treize ans. La Roche Courbon sera désormais son nom..
Dans la deuxième moitié du XVIIe siècle, Jean-Louis de Courbon petit-fils de Jacques va créer de superbes jardins à la française arrêtés à l’ouest par le Bruant et développés sur l’esplanade entre deux pavillons Louis XIII.
Le château est à l’apogée de sa beauté, de larges fenêtres ont été percées, un balcon construit en avancée et un escalier à double paliers descend vers les jardins. Les de Courbon vivant près de Paris à la cour du Roi, leurs beaux jardins tombent petit à petit dans l’oubli…
Un document datant de 1710 de l’architecte militaire de Louis XIV montre que le corps de logis Est et deux puissantes tours n’existent plus.
En 1785 Le Marquis Sophie-Jacques de Courbon Blénac reprend le bien familial et n’ayant pas émigré, le château n’est pas vendu comme bien national, à la Révolution. Sa fille vendra le domaine aux enchères en 1817 et le long sommeil du château durera jusqu’au XXe siècle.
Le 21 octobre 1908 dans Le Figaro, Pierre Loti écrit : « Qui va sauver de la mort une forêt avec son château féodal campé au milieu, une forêt dont personne ne sait plus l’âge ».
C’est en 1920 que le Saintongeois Paul Chénereau (1869-1967) polytechnicien, passionné d’art va mener de front son industrie de conserves alimentaires à Rochefort et Madagascar et la Société du Domaine de La Roche Courbon, fondé en 1925 avec son père et l’un de ses frères. De 1928 à 1939 pour la création du jardin à la française, l’architecte-paysagiste Ferdinand Duprat (1887-1976) fait prolonger par le creusement d’une pièce d’eau la construction d’un embarcadère en aval des jardins et la création d’une cascade appuyée sur la colline. Également la remise en état du château n’omettra pas le cabinet des peintures du XVIIe, la Chapelle, ni un théâtre nouvellement créé. Le château se verra classé pour partie aux Monuments Historiques en 1925 puis en 1946 dans son ensemble (Château, jardin et parc)..
En 1967, Paul Chénereau laisse à ses enfants Marie-Jeanne et Jacques Badois, centralien, la charge du domaine. Trois campagnes de restaurations des tours nord et sud, du corps de logis et des communs dont la grange de 750 m2 dévastée par un terrible incendie en 1990, auront duré de 2003 à 2010. De plus la seule nuit du 26 au 27 décembre 1999 des vents à 220 km|h ont détruits environ 90 ha sur les 150 ha de la forêt.
Un chantier titanesque, étalé sur vingt-cinq ans de 1976 à 2000, est engagé pour mettre en place les 2500 pieux enfoncés jusqu’à 8 et 13 m de profondeur. en effet, il aura suffi de vingt ans pour que les marais deviennent les ennemis des jardins. Tout s’affaisse, allées et arbustes compris à raison de 8 cm par an. Seule solution trouvée par Jacques Badois et son épouse Christine Sebert, reconstruire les jardins sur pilotis. La Direction Régionale des Affaires Culturelles, le Conseil Régional de Poitou-Charentes et le Conseil Général de Charente-Maritime auront contribué au financement de ce sauvetage.
Laissons conclure le marin, le poète et académicien que fut Pierre Loti « Je m’en suis allé par toute la terre…. me disant à chaque fois que rien des lointains pays, n’était plus reposant ni plus beau que ce coin si ignoré de notre Saintonge ».
Comentarios